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Les Chants
11 juillet 2007

- Chant premier -

Monologue d'une fugue.

                                 Aux alexandrins mutilés
                                 Au clair
                                 De Terre...


Fugue outrepassant les terres et les océans,
Le torse protégé par un tissu loqueté;
Refusant sa vie, son passé, comme un mendiant;
Orgueilleux, fier, comme le suprême déshérité.

S'arrêtant dans les auberges
A la recherche d'une niche.
Ses habits sont ses bandages
Sa liberté; une biche.

Reniant la compassion de ses frères
Il ne mange pas dans la main de la Nature.
Comme un enfant privé de sa mère
Il sent chaque jour grandir une torture.

Seul sur les routes à toute heure;
Il ne veut point de camarade, point d'ami.
Le seul vivant pour lui: son coeur;
Il bat perpétuellement dans un sublime ennui.

Son lever ne s'effectue que par ironie,
Sa vie n'est qu'un refus de subordination;
Il a perdu ses pairs, ses frères, sa patrie,
Marchant, dormant, au gré de Soleil-le-Bon.
                      *****

Sa langue s'est perdue il y a longtemps,
Remplacée par une couleuvre aux yeux d'argents
Qui jaillit à chacun de ses rires édentés
Pour ôter la vie au passant infortuné.

Son nez est devenu lame;
Acérée comme un rasoir;
Affutée par tant de larmes,
Pointues comme un rêve illusoire.

Ses dents sont des crocs aux pointes de cristal;
Claquant comme un instrument de la Géhenne;
Chantant le propre requiem de la Haine
Qui résonne dans les rares nuits sans étoiles.

Ses yeux ne sont que des pierres,
Qui rentrent et sortent de leur logis,
Au rythme indécent des jours clairs
Transportant la peur de la nuit.

Le vent jalouse la grâce de ses pas.
La mer envie son calme dogmatique,
Et les deux s'associent pour savoir qui verra
Une faille dans une telle perfection angélique.

Là où il va son éclat injurie le soleil;
Son mysticisme assombrit la nuit même,
Son gazouillement désacralise les corneilles
Sa chasteté ridiculise l'hymen.
                      *****

Dieu inquiet par une telle création exaltée
S'enivre du vin d'une vigne céleste
Et, de colère, foudroie ce suprême effronté
Qui, pétrifié par l'éclair, commet le divin inceste

Il s'en va par les cieux; traverse les nuages,
Et voyant apparaitre sur sa pupille profane
Cette abomination faite de croyances, de rages,
Le prend dans une étreinte et lui baise le crâne.

La divinité terrible, boueuse et crottée,
Devant avouer par ce symbolique baiser
Sa ressemblance avec ces affamés fugueurs,
Désire plus fort inspirer la peur;

Elle descend sur Terre et prend la forme d'un loup
Au gosier gorgé d'un sang pur,
Du sang d'agneau, du sang d'un fou.
Élevé par une quelconque "Kultur"

Le déshérité, mendiant mais repu,
Regarde avec étrangeté le ciel
Qui délivré de cet ignoble individu
Semble être une orgie; un divin bordel.

Les anges, abasourdis par la perversité
du Maitre, se débauchent d'une auguste façon;
Crucifiant leurs partenaires de satiété
Au moyen de croix en or, et de clous en plomb.
                      *****

Les jours se couchent, les nuits se lèvent;
Preuve du dédain qu'éprouve la mère Nature
Pour ces dieux ineptes et ces sacrées Pourritures
Disparus dès lors au plus profond de nos verves.


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